Mme le Maire,
Vous n’êtes pas sans savoir qu’il est très difficile de se loger à Montpellier, d’autant plus en cette période de crise, et du fait, notamment, d’une très importante pression démographique en plus des habituels phénomènes de spéculation. C’est pourquoi de nombreuses personnes se retrouvent dans l’impossibilité de payer leur loyer, dans des situations où l’on dort dans son véhicule ou sur le canapé d’une âme charitable. Parfois, il arrive que des personnes dans ces situations précaires repèrent un logement vide et décident de l’occuper.
C’est ce qui nous est arrivé, et vous avez probablement été informée de l’occupation d’une maison appartenant à la SERM, dans le quartier Figuerolles. Celle-ci, située au 31, rue du Père Fabre, est vouée à être réhabilitée dans le cadre du projet Grand Cœur.
Par la présente, nous sollicitons un rendez-vous avec vous ou vos services, afin d’examiner la possibilité de trouver un accord. En effet, nous pouvons lire dans la convention Grand Cœur :
« l’aménageur […] empêchera par tous les moyens à sa disposition la réoccupation de ces immeubles […] sauf s’ils sont susceptibles de recevoir, à la demande de la collectivité publique cocontractante, une utilisation provisoire. Dans ce cas, les terrains ou immeubles ne peuvent faire l’objet que de conventions d’occupation précaire. »
Vous savez sans doute que le phénomène des squat est ancien à Montpellier et le traitement purement répressif du phénomène ne l’a jamais supprimé. Nous souhaitons donc attirer votre attention sur le rapport ministériel « Autour des squats », daté de décembre 2000, qui souligne que « très peu de structures sont capables d’accueillir des collectifs de jeunes. Le marché de l’habitat n’existe pas pour ces personnes. » Ce rapport préconisait donc qu’à terme, « la législation doit évoluer pour permettre aux magistrats d’ordonner une réelle solution, plutôt que de trancher douloureusement pour l’une ou l’autre des parties, à partir de moyens prévus pour d’autres situations et avec pour conséquence le simple déplacement de la situation jugée et la reproduction des problèmes sociaux, juridiques et d’ordre public qu’elle induit. »
En effet, la loi SRU, votée le même mois de la même année, semble prendre en compte ces considérations. L’article 140 stipule ainsi que « La politique d’aide au logement doit tendre à favoriser une offre de logement qui par sa diversité de statut d’occupation et de répartition spatiale, soit de nature à assurer la liberté de choix de son mode d’habitation. »
D’autres villes, peut-être un peu plus importantes que Montpellier, certes, ont choisi de permettre l’existence d’espaces autogérés qui mêlent vie collective et activités culturelles et/ou politiques. A Grenoble, Dijon, Toulouse ou Paris ces lieux remplissent à la fois une mission sociale pour les personnes qui y habitent, une mission d’accès à la culture en même temps que de diffusion d’une culture indépendante et méconnue, un rôle de vivification de la démocratie locale enfin.
Nous ne nions pas avoir des divergences avec la politique municipale. Le quartier Figuerolles risque par exemple de perdre une bonne part de son identité si la mission Grand Cœur s’y contente de 20 % de logements sociaux. Mais une vraie démocratie a besoin de l’expression de toutes les opinions et nous pensons donc que le rôle de la municipalité est de la favoriser.
Le rapport et la loi sus-cités viennent de l’époque où le parti socialiste dirigeait le pays. Il nous semble donc cohérent de penser qu’une mairie dirigée par le même parti s’en inspire. Nous sommes ouverts à toutes propositions : s’engager à titre individuel ou dans le cadre d’une association ; dans le lieu que nous occupons actuellement ou dans un autre.
Dans l’attente d’une réponse de votre part ou de vos services, nous vous adressons, madame le Maire, nos salutations.
Le collectif des habitants
Copies à : la SERM, Mr. l’adjoint à la démocratie participative et au contrat urbain de cohésion sociale, Midi-Libre.